TÉMOIGNAGE
Une imprimerie à l'heure de l'ISO 9002,
Busson-Rosay en Seine-Saint-Denis.

Le groupe Busson-Rosay est formé par deux grandes imprimeries, autrefois indépendantes, Rosay et Busson :  toutes les deux septuagénaires, elles ont décidé d'unir leurs forces en 1997. Elles pesaient plus de 74 millions de francs de chiffre d'affaires et employaient 84 personnes. Situé à deux pas du Stade de France, et de l'antique ville royale de Saint-Denis, le groupe occupe une place stratégique, surtout depuis les résultats du mondial !... Nous sommes allés demander Responsable Qualité de l'entreprise de nous expliquer comment s'était déroulé la mise en place d'une démarche qualité.

Les locaux de l'imprimerie Busson-Rosay (Photo Eric Essertet)

Présence : Quand avez-vous débuté votre action qualité ?

Le Responsable qualité : J'ai pris mes fonctions en juin 1997, mon but était, alors, de développer un projet qui rassemble les énergies et motive le personnel de notre groupe, tout en plaçant le client au centre des préoccupations de chacun d'entre nous.

Présence : Qu'imprimez-vous ?

- Nos réalisations vont des documents médicaux aux plaquettes de prestige, en passant par des affiches, des catalogues, et toutes sortes de brochures que nous sortons tant en impression offset qu'en numérique.

Présence : Et vos principaux clients ?

- Ils viennent du monde de la presse, des laboratoires pharmaceutiques, de la banque, de la publicité, des agences de communication, des galeries d'art. Parmi nos clients, nous comptons aussi des fédérations sportives, des industriels de la cosmétique, etc.

Présence : En somme, beaucoup de clients exigeants...

- Oui, et c'est pour cela qu'il était important, pour le groupe d'engager une démarche qualité ; il s'agissait d'assurer notre pérennité, car, en matière d'imprimerie, la concurrence est fort rude …

Présence : En quoi constitue votre tâche ?

- Dès ma prise de fonctions, en juin 1997, j'ai effectué deux études internes auprès de la direction, d'une part, et du personnel, d'autre part.

Présence : C'est-à-dire ?

- J'étais devant une situation difficile à gérer puisque le groupe est formé de deux entreprises présentant un management et des méthodes de travail différents l'une de l'autre. Je devais donc chercher une complémentarité entre elles afin qu'elles soient managées d'une seule et même manière pour tendre vers un seul et même objectif.

L'implication de tous

Présence : Comment le personnel a-t-il ressenti votre nomination ?

- Il faut reconnaître qu'elle a, d'abord, été assez mal perçue : elle était à l'origine de craintes et d'appréhension.

Présence : Qu'est-ce qui vous a permis de surmonter ces réticences ?

- J'ai essayé d'instaurer un dialogue permanent avec tous les personnels. Pour ce faire, je me suis appliqué de faire le tour des ateliers chaque matin et de saluer tout le monde afin de cerner les besoins de chacun et d'affirmer les objectifs initialement fixés. J'ai donc opté délibérément pour une méthode participative, basée sur l'implication de tous.

Présence : Vous semblez insister beaucoup sur l'aspect humain de votre démarche ?

- L'implication de tout le personnel me semble nécessaire, car il serait illusoire de penser qu'un quelconque changement trouve une pérennité, si l'ensemble des acteurs ne comprend pas et donc, n'adhère pas à cette évolution et au projet. Aussi très vite, les gens se sont aperçus que ma présence n'avait qu'un but : les aider à améliorer l'organisation des méthodes de travail et à améliorer la qualité de notre prestation, et non les contrôler...

Présence : La communication avec le personnel est donc un des volets primordiaux de la démarche qualité ?

- Les semaines qui ont suivi mon arrivée, j'ai édité un journal qualité interne que j'ai baptisé "Qualibri" : la qualité chez Busson-Rosay Impression. Mon premier objectif, avec cette petite publication, était de rester continuellement en contact avec tout le personnel du groupe, de les informer des avancées de la démarche qualité dans le groupe et des différentes décisions prises, de les sensibiliser par des approches ciblées afin qu'ils se sentent constamment concernés par la qualité. Et, enfin, les habituer à un vocabulaire qualité commun.

Présence : Concrètement, qu'est ce qu'une telle publication peut apporter ?

- Chaque mois, le journal leur est remis en mains propres : ce qui m'a permis, là encore, de rencontrer chacun, individuellement, de parler qualité et donc d'écouter, de mesurer les craintes et les attentes de chacun d'entre eux afin de remotiver les moins actifs dans la démarche qualité.

Le Stade de France : à deux pas de Busson-Rosay (Photo Eric Essertet).

Présence : Revenons un peu en arrière. A votre arrivée, vous avez  fait en somme l'état des lieux…

- J'ai analysé l'ensemble des documents qui m'ont été remis par les responsables du groupe. J'ai décidé de créer un nouveau dossier de fabrication en lui donnant un nouveau nom : "Dossier de production" :  j'en ai fait le " noyau dur" du système qualité.

Présence : Pourquoi avoir choisi de travailler sur ce document ?

- Pour trois raisons. D'une part parce que, ainsi que nous l'avons vu, notre groupe est né du rapprochement de deux grandes imprimeries, et chaque imprimerie avait conservé ses propres documents de fabrication : il était urgent d'arriver à des documents communs.

D'autre part, parce qu'il devenait vital d'obtenir et de présenter un premier résultat positif, sous peine de voir le personnel se démobiliser, se démotiver. Or, et c'est là, ma troisième raison, le dossier de production est l'élément fédérateur de notre métier, car il passe entre les mains des trois-quarts du personnel du groupe : il permet à tous les responsables des départements du groupe de s'y attacher pour prendre connaissance du besoin du client et donc de le réaliser.

C'est par son intermédiaire que nos employés prennent connaissance des tâches à réaliser. Il fait donc le tour de l'ensemble de l'usine (ateliers de fabrication, de pré-presse, de montage-copie, d'impression, de façonnage, etc) et, grâce à une fiche de suivi de production, il permet d'analyser l'ensemble des étapes, tout en responsabilisant les employés puisqu'il les pousse à des auto-contrôles, afin de détecter les différents problèmes rencontrés et d'y remédier.

Réaliser des économies

Présence : Le lancement de ce document a dû créer une dynamique ?

- Cela m'a permis de revoir l'ensemble des documents de travail, selon un schéma directeur dont le pivot est la qualité de l'organisation de notre système, l'ensemble, bien entendu, devenant commun aux deux entités.

Présence : Parlez-nous du comité de pilotage de la qualité que vous avez mis en place.

- Il a vu le jour en novembre 1997 et avait pour mission de fédérer tous les points de vue en matière d'assurance qualité, en tenant compte de la politique générale suivie par le groupe. En même temps, et par l'intermédiaire du journal "Qualibri", j'ai fait appel à des volontaires pour participer à un groupe d'amélioration de la qualité. J'ai ainsi pu traiter des questions très proches des préoccupations quotidiennes du personnel.

Présence : Quelle a été la réaction de vos clients lorsqu'ils ont appris votre démarche qualité ?

- En décembre dernier, l'un de nos principaux prospects a demandé de nous auditer. Ce qu'il aurait fait même si nous n'avions pas entrepris notre démarche qualité. Mais puisque cette visite pouvait s'inscrire dans le cadre d'une analyse des avancées qualité, nous avons tout de suite accepté.
Avant la date d'audit, j'ai demandé à l'ensemble des opérateurs d'être très vigilant, de relire les procédures, d'avoir sous le coude leurs documents de travail, etc. Nous avons eu certes quelques non-conformités, mais, nous avons répondu très favorablement au rapport d'audit en proposant un calendrier de corrections au client qui était très satisfait.

Présence : Ces exigences extérieures ne vous ont donc pas "effrayé " ?

- Non, car j'ai été formé, lors d'un stage aux techniques d'audit interne. Et notre audit a permis de vérifier les exigences des normes qualité en matière de revue de contrat, maîtrise des documents et des données, maîtrise des équipements de contrôle, de mesure et d'essai, d'audits internes, ainsi que quatre instructions techniques relatives à la maîtrise des processus.

Présence : On met souvent en avant que la mise en place d'un système qualité permette à l'entreprise de mieux travailler, donc de réaliser des économies substantielles. Avez-vous un cas précis à nous
exposer ?

- Suite à l'analyse des fiches de suivi de production, nous avons constaté une perte due à un problème de plaques offset qui m'a amené à mettre en place une fiche de gestion de plaques dont le but était de permettre une meilleure analyse de ce gâchis.

Présence : Où en êtes-vous dans votre démarche ?

- Nous sommes maintenant dans la dernière ligne droite. Au début du printemps dernier, trente-neuf des quarante-deux procédures constituant notre référentiel ont été rédigées et diffusées aux intéressés.
Conformément à notre manuel d'assurance qualité, nous avons tenu une revue de direction qui a mis au point nos objectifs en matière qualité, ainsi qu'un planning d'audits internes s'étendant jusqu'au mois de septembre.

Et pour préparer l'ensemble du personnel à l'examen final de certification ISO 9002 qui devra avoir lieu avant la fin de cette année, j'ai édité un document interne servant de formation à la qualité et aux normes ISO 9000. Il s'agit d'un petit document d'une cinquantaine de pages détaillant l'ensemble des informations importantes relatives à la démarche qualité. Il traite des différentes définitions des normes et explique dans le détail les dix-neuf exigences de la norme ISO 9002.

                                                                                                  Propos recueillis par Éric ESSERTET
                                                                                                 (Septembre 1998)
 
 

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